« Voici le signe qui vous est donné » déclare l’ange aux bergers, après leur avoir annoncé la bonne nouvelle de la naissance du Messie Sauveur. (Lc 2, 12) La scène qu’ils s’apprêtent à découvrir a donc valeur de signe. Une image peut-être trop familière pour chacun d’entre nous, qui ne cesse pas pourtant d’inspirer les artistes depuis des siècles – jusqu’aux bénévoles qui ont réalisé la crèche de l’église ! Pour la regarder avec un œil neuf, la parole énigmatique de l’ange demeure précieuse… : « vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »
Un signe, trois indices :
un nouveau-né : ce n’est pas la première fois que Dieu sauvait son peuple, mais dans le mystère de l’Incarnation, comprenons que la nouveauté dans laquelle l’homme est introduit est radicalement nouvelle. Le Verbe incarné « plein de grâce et de vérité » s’apprête à offrir rien de moins que sa propre vie. Il fallait un nouveau-né pour appeler les hommes à naître à nouveau.
emmailloté : le Dieu fait chair ne l’est pas seulement en apparence, Il est réellement homme et donc dépendant, comme tout homme, des autres, à commencer par Marie et Joseph ! L’emmaillotage n’est-il pas le symbole de notre coopération nécessaire à la grâce divine ? Le saint baptême qui inaugure la vie chrétienne n’est pas un vaccin magique, mais un don d’amour convoquant la foi et l’amour appelés à déployer le don divin reçu.
dans une mangeoire : cette coopération de l’homme ne saurait, pour autant, représenter un activisme de plus ! L’agir chrétien est bien davantage qu’un simple humanisme (qui, sans Dieu, conduit à l’égolâtrie). Il est une offrande, un « sacrifice » au sens originel et noble du terme. La vie chrétienne, depuis la Croix jusqu’à l’autel, s’accomplit dans la célébration de la messe, chaque semaine. La vie baptismale est eucharistique ou elle n’est pas : le fidèle du Christ est appelé à être mangé comme du bon pain, à l’école du Maître.
En somme, pour que la naissance du « Sauveur, le Christ, le Seigneur » puisse procurer la «grande joie» qu’elle promet, il importe de contempler et de percevoir la portée du signe donné par le Ciel. Pour que les bergers – et nous avec eux – ne passent pas à côté, l’ange en bon pédagogue, nous offre un commentaire lapidaire, mais précieux pour qui veut bien l’accueillir.
Noël n’est pas un conte de fée, mais le « mythe devenu réalité » (Lewis) : le surgissement d’une nouveauté qui dépasse l’entendement, mais qui convoque tout homme et l’homme et culmine dans l’offrande de nous-mêmes à la suite de Jésus-Christ.
Le Fils de Dieu n’est pas venu pour nous émouvoir, ou alors… pour nous émouvoir au point de nous laisser enfin sauver !
Abbé Simon Chouanard