Des idolothytes aux consignes sanitaires, l’attitude juste

Des idolothytes aux consignes sanitaires, l’attitude juste

Quelques années après l’assemblée de Jérusalem (Actes 15), Saint Paul prit la peine d’écrire longuement aux disciples de Corinthe pour trancher la question délicate des idolothytes. Sur le fond, la question n’est plus à l’ordre du jour, mais la façon dont l’Apôtre la résolut me semble précieuse pour inspirer la conduite à tenir à l’égard des normes sanitaires et c’est en tout cas le choix que j’ai fait, pour la paroisse, depuis le début de la « crise ». Je vous invite à méditer les chapitres 8 à 10 de la Première lettre aux Corinthiens.

 

De quoi s’agit-il ? À Corinthe, l’augmentation notable de chrétiens non-issus du judaïsme fait apparaître de nouvelles questions. À l’époque, il existe une pratique courante, chez les païens, qui consiste à offrir des viandes aux idoles, la moitié de l’offrande étant brûlée sur les autels des temples, l’autre étant consommée par le commanditaire ou revendue sur le marché. Les incirconcis devenus disciples du Christ ont rompu avec ces croyances mais demeurent profondément liés à ce milieu et donc ces pratiques. Ainsi, il est très courant de se retrouver à table avec de telles viandes, d’autant qu’elles sont souvent moins chères à l’achat ! Pourquoi s’en priver puisqu’elles ne représentent absolument rien ? Si on a à juste titre ; conscience de la vanité des idoles, ne faut-il pas faire  preuve de cette si belle « liberté des enfants de Dieu », marque si singulière du christianisme authentique ? Sur le fond, le raisonnement est juste, mais c’est faire trop peu de cas des disciples issus du judaïsme qui, quoique pleinement entrés dans la Nouvelle Alliance, pourraient avoir l’impression de se souiller et de sacrifier au paganisme le plus blâmable. Que faire ?

 

La réponse de Paul est intéressante : il ne fait aucun doute que la consommation de viandes sacrifiées est sans conséquence en soi, pour les uns comme pour les autres. Pour autant, les esprits les plus libres, affranchis de l’esclavage de la peur, sont priés de respecter ceux qui demeurent tributaires de croyances par définition illusoires. Cela, au profit de ce qu’il importe le plus de préserver : la communion fraternelle de l’Église. Bref, que nul ne scandalise ceux qui pensent qu’il est nécessaire d’observer ces pratiques parfaitement inopérantes. Humblement, il s’agit de reconnaître notre commune ignorance et le fait que chacun demeure dans ses domaines d’incompétence respectifs. Pourvu seulement que ces croyances mineures ne compromettent pas le dépôt de la foi et le trésor de la charité !

 

De façon comparable, je sais qu’il existe une très grande diversité d’opinons concernant les normes sanitaires en vigueur dans notre communauté. Si les familles, et mêmes les couples, rencontrent des divergences à ce sujet, que dire d’une paroisse ! Mais je souhaiterais que nous continuions d’observer, en attendant, comme je vous l’ai demandé et rappelé de nombreuses fois à l’oral et sur l’affichage de l’entrée, les préconisations des pouvoirs publics relayées dans notre diocèse. Ainsi, chacun demeure libre de penser que le masque est salutaire ou parfaitement inutile et même aussi dangereux qu’une fausse assurance… peu importe, je demande à chacun de continuer de le porter lors de nos offices communs, en attendant que la recommandation soit levée. Ainsi pour tous les repères concernant les distanciations, la communion et toutes les mesures désormais bien connues. Dans l’Église, l’obéissance n’est pas demandée aux seuls prêtres, elle est requise de tout fidèle du Christ et je veux d’ailleurs remercier la très grande majorité d’entre vous qui continuez d’observer ces dispositions, bon gré mal gré. Encore une fois, libre à chacun de penser qu’elles sont parfaitement inefficaces : il n’existe assurément aucun consensus scientifique digne de ce nom ; mon critère n’est pas d’ordre sanitaire : il relève de la charité, norme suprême de toute décision. Il faut respecter ce que le contexte général délirant suscite comme craintes et réactions et ménager chacun : « la science enfle, mais c’est la charité qui édifie ! Si quelqu’un s’imagine connaître quelque chose, il ne connaît pas comme il faut connaître » 1 Co 8, 2… : « prenez garde que cette liberté dont vous usez ne devienne pour les faibles une occasion de chute » !

 

votre serviteur,

Simon Chouanard