Pour la première fois
Debout, rameaux en mains, il faudrait que chacun ose se le dire, en toute humilité : « C’est la première fois que j’entends ce récit ! ».
En effet, qui peut prétendre avoir déjà « écouté la leçon », « décacheté la lettre », accueilli en son cœur la plus grande déclaration d’amour de l’Histoire de l’humanité ? Si, « chaque matin », inlassablement, la Parole de Dieu cherche à me réveiller « pour que j’écoute comme celui qui se laisse instruire » (Is 50, 5) que je pénètre le dessein miséricordieux du Père, celle-ci redouble ses assauts durant la Semaine de la Passion !
En quelques versets, la Passion, chronique des derniers pas du Fils de l’Homme, s’offre à ma contemplation. Elle m’invite à saisir, dans la moindre parole, le moindre silence et dans chaque geste du drame, l’accomplissement des promesses séculaires. Plus profondément, elle voudrait me faire saisir qu’elle le récit de ma propre libération.
Il serait plus simple d’oublier, de rejoindre le monde dans son amnésie… Tout me distrait de ce mémorial et semble conspirer pour m’éviter d’en saisir la portée actuelle. Et pourtant ! Si je suis libre aujourd’hui, c’est parce qu’Il s’est fait esclave. Si je suis vivant c’est parce qu’Il est mort pour moi. Si j’espère accéder un jour à la vie éternelle, c’est parce qu’Il m’en a ouvert l’accès !
Alors, debout, rameaux en main, je vais parcourir le chemin de la Croix et écouter, pour la première fois, ce que Jésus voudrait faire entendre à chacun d’entre nous : « J’ai pensé à toi dans mon agonie, j’ai versé telles gouttes de sang pour toi… » (Pascal).
Quel mystère ! « Que son Sang soit sur nous et sur nos enfants » (Mt 27, 25) : la malédiction des hommes envers Dieu est devenue bénédiction de Dieu envers les hommes. La Croix est devenue Lumière. Oui, pendant qu’il est encore temps, je voudrais commencer à comprendre…
Abbé Simon Chouanard